Rebecca de Daphné du Maurier
Daphné du Maurier est considérée comme un auteur classique, vu son succès international dans les années 50.
Je vous parlerai plus particulièrement de « Rebecca » publié en 1938 et qui est son œuvre la plus connue, mais il y en a d’autres très intéressantes comme « la maison sur le rivage » ou « ma cousine rachel ».
Dans Rebecca, on retrouve un peu l’ambiance de Jane Eyre, car ici aussi il s’agit d’une jeune fille d’origine modeste pas extraordinairement jolie qui tombe sous le charme d’un homme riche plus vieux qu’elle, et chez qui elle va découvrir des secrets de famille mystérieux.
La ressemblance s’arrête pourtant là. « Rebecca » est bien plus captivant car il y a une atmosphère de mystère, une intrigue avec bien plus de suspense. De la narratrice, on ne sait pas grand-chose, même pas son prénom, juste qu’elle est au service d’une vieille américaine désagréable quand elle rencontre Sir Maxim de Winter, récent veuf qui vient cacher son chagrin sur la riviera.
Au bout de quelques jours seulement, il la demande en mariage à son grande surprise et l’emmène vivre sur son magnifique domaine de Cornouailles à Manderley. L’heroïne que l’on découvre inexpérimentée et peu sûre d’elle dans une innocence qui confine à la naïveté y est confrontée au fantôme encombrant de l’ex-femme de Maxim, Rebecca, morte noyée il y a un an.
Elle a l’impression de ne pas être à la hauteur, de ne pas avoir la carrure pour être la maîtresse de Manderley et garder le cœur de Maxim, surtout avec la surveillance de l’acarîatre gouvernante Mrs. Danvers qui la malmène. On traverse ainsi le roman par les yeux de la nouvelle petite Mme de Winter, qui perd peu à peu pied, jusqu’à un certain jour où la situation bascule et où elle se rend compte que la réalité n’est peut-être pas du tout ce qu’elle croyait. A partir de là, elle va prendre une toute autre étoffe dans l’intrigue.
Rebecca est un des romans les plus impressionnants du XXe siècle. Je me demande encore comment Daphnée du Maurier a pu inventer un monde aussi complexe et tourmenté que celui de Manderley. Rebecca est un roman d'ambiance, un roman ou l'atmosphère est plus pesante et plus angoissante que dans n'importe quel autre roman que je connaisse. On ne peut pas décrire l'impression que la lecture de ce roman nous fait, comment un poids nous tombe sur la poitrine nous oppressant un peu plus à chaque instant jusqu'à ce que nous ayons l'impression de suffoquer. Puis la libération du dénouement, le soulagement final où brusquement le poids si pesant s'évanoui.
Plus que son style, c'est la finesse de la psychologie de ses personnages qui est remarquable dans Rebecca. La jeune et frêle narratrice va devoir apprendre à s'affirmer dans cette maison ou la première épouse est toujours aussi présente et impose encore sa loi malgré sa mort. Le changement de personnalité de Max de Winter est aussi particulièrement fine, homme sympathique et ouvert à Monte-Carlo, il devient froid et renfermé sous les hauteurs de Manderley. Mrs Denver, gouvernante de Manderley, femme stricte froide et folle, perpétue le souvenir de son ancienne maîtresse avec un acharnement presque religieux. Enfin, Rebecca, absente mais toujours là, indéfiniment présente dans sa mort.
Le miracle de ce roman est de faire vivre de façon oppressante et incompréhensible un personnage mort avant le début de l'histoire, qu'on ne voit jamais et mais qui malgré reste l'obsession principale de toutes les autres personnages jusqu'à donner son nom au titre du roman.
Meilleur qu'un roman policier, plus effrayant qu'un roman d'horreur, Rebecca est un livre où le poids des secrets dévorent tout sur son passage.
Daphné du Maurier est une romancière anglaise, née en 1907 a Londres, décédée en 1989.
Elle est la fille de l'acteur Gerald du Maurier et la petite-fille de l'écrivain et dessinateur George du Maurier ami de Henry James et auteur notamment de Trilby. Elle publie son premier roman, The Loving Spirit (La Chaîne d'amour), en 1931 et épouse l'année suivante le général de division Frederick Browning.
Trois de ses romans ou nouvelles furent portés à l'écran par Alfred Hitchcock :
- L'Auberge de la Jamaïque (1936), adapté en 1939.
- Rebecca (1938), adapté au cinéma en 1940
- Les oiseaux (1952), adapté au cinéma en 1963
Voila Daphne du maurier, c’est le croisement de la littérature anglaise classique avec l’épouvante des romans gothiques tels que Frankenstein ou Le tour d’écrou par exemple.
